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Queen Kane's castle
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12 juin 2010

Music and Madness

Tu refais surface comme un être marin après des années sans côtoyer la même lumière, le même oxygène que la toute petite personne que je me sens devenir en ta magistrale présence. Rien n'est plus beau, plus admirable que toi, Sentiment, qui comble le néant de mon âme automnale débarrassée de ses faiblesses, fleurs d'un autre temps. Naïveté, bêtise, il n'est de mot pour qualifier cette exquise extase qui serre mon coeur entre ses paumes, laisse-moi seulement humer ce désir d'appartenir à ton univers, là où les étoiles ne sont rien d'autre que des points brillants dans un décor de soie.
Tu refais surface jusqu'à ce que la prochaine lame de fond t'emporte. Sans te débattre tu vas laisser mon corps à froid, tu vas blesser mon émoi et t'anéantir sans remord. Tu m'oublieras aussi vite que ton regard s'est posé sur cette lumière qui perce les nuages noirs. Tu reprends tes droits en un battement de cils, vile créature éclaboussant mes certitudes. Je ne peux vivre sans aimer, aussi longtemps que tu ne m'auras pas tuée, tu te serviras de moi sans même y prétendre. Tu es d'une laideur à faire pâlir, aussi repoussant qu'attirant et tu tiens les cordes de ma balançoire. D'un côté, de l'autre, sensationnel vertige au dessus de l'eau. Tant que je me balance, c'est que je vis malgré la tempête et l'armée qui menace sous mes pieds.

Je me suis souvent demandé si ce n'était pas la lumière qui te contemplait, Roi des Océans.

Ne lâche pas ma main. Ne t'en vas pas. Parfois j'aimerais posséder d'absolus pouvoirs. J'ordonne qu'on se méfie encore des terrains qui nous semblent stables, on ne peut jamais faire confiance aux éléments. Cela n'a rien à voir avec la peur, je voudrais juste pouvoir graver dans ma peau cette sensation de main protectrice dans la mienne. Il faut qu'il voit ça, le soleil, il faut qu'il voit mon bonheur, qu'il traverse les branches des arbres et qu'il vienne caresser vos joues empourprées par son évocation. Tout passe au travers. La vie n'est qu'un sablier, pas de passoire à rêves, comme la mémoire laisse s'enfuir les souvenirs à tire d'ailes, lutter est inutile.

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Ils viennent d'ouvrir cette boîte en bois qui sent incroyablement bon... il ne reste qu'un cigare. Marie a trouvé l'astuce pour le couper comme il convient et elle partage ce dernier trésor avec Driss, accompagné d'un verre de vin rouge. Je les observe avec admiration, ils ont une de ces classes ! On discute de tout et de rien mais l'ambiance qui envahit alors la pièce est un roman à elle seule. Le chat blanc aux magnifiques yeux verrons circule entre nous, observant avec attention nos moindres faits et gestes, elle nous protège sûrement. Ce soir je dors aux côtés d'une rêveuse et, recroquevillée sous la couette tandis qu'elle lit un livre et fume sa dernière cigarette, je jubile. Tant de bonheur à griller mes précieuses heures de sommeil, je ne pensais pas ça possible. Le matin arrive et je me retrouve sur le sol, morte de rire car Marie s'étant levée, elle a déséquilibré le canapé qui m'a fait tomber. Je remonte aussitôt et tente de me rendormir, en vain. Driss s'est levé. Profitant de ces derniers instants au charme comparable à la douceur d'un nuage, je marmonne :
- Je me sens comme chez moi.
- C'est le but, me répond Driss qui s'empresse de relever le canapé pour que je reste coincée dedans.
Dans l'après-midi Alice nous rejoint. Cette fille c'est quelque chose, elle est tout près de vous, elle vous parle et pourtant elle semble à des milliers de kilomètres, intouchable et mystérieuse. Même à moitié ivre, quand elle se met à danser avec des lunettes noires elle a des airs de grande dame, d'actrice délurée au sommet de sa gloire. Je suis fière de connaître de telles personnes, qui n'ont pas peur d'être ce qu'elles sont vraiment en toutes circonstances et qui se donnent les moyens de leurs ambitions.


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C'est un peu décousu mais tant pis. J'adore marcher sur les grandes étoiles rouges, oranges et jaunes que l'automne a semé sur ma route. L'hiver arrive déjà et je constate que la folie ne s'est pas encore emparée de moi. Je me demande ce qu'il faut faire, mon esprit pourtant tend à lui appartenir entièrement, voguant sur de sombres océans tourmentés par de noires pensées. Les génies sont tous un peu fous quelque part et pour oser il faut au moins ça, la volonté à elle seule ne suffit pas. J'ai quelque chose de fou en moi. Ce que les gens qualifient de « bizarre » tantôt je le hais tantôt je m'y accroche fermement, de peur que ce ne soit là l'unique portrait que mes pairs feront jamais de moi. Être bizarre c'est inspirer un sentiment à celui ou celle qui nous observe ou qui nous croise. N'approchent les gens bizarres que les gens curieux et peu enclins aux jugements trop prompts. Oh bien sûr dans toute relation je suis la seule à focaliser sur la chose de peur qu'elle ne m'échappe, la seule à y réfléchir longuement jusqu'à ce que comme toute pensée elle devienne obsessionnelle et finisse par perdre tout son sens. Je n'ai aucun recul à force de revenir sans cesse sur les mêmes sujets. Je sais seulement qu'à « timide » je préfère encore « bizarre ». Un timide n'est pas nécessairement anormal, un « bizarre » lui aura sans doute des difficultés sociales bien plus grandes par son incapacité à rentrer dans le rang. Il semblerait que mes « choix » vestimentaires effraient moins aujourd'hui que lorsque j'étais au lycée. J'ignore si c'est positif mais ça pose moins de problème, apparemment. Il est certain qu'une personne qui parle peu souvent, arrivant au milieu d'une conversation pour citer « critique de la raison pure » est passablement étrange et drôle à la fois, je ne fais pas attention quand on parle de philosophie ou d'art, la plupart du temps je ne peux pas m'empêcher d'intervenir. Après réflexion toutefois je me dis que certaines approches pour faire connaissance avec les gens de ma promotion n'étaient pas du meilleur effet et auraient mérité sinon d'être reformulées au moins d'avoir une forme plus travaillée. Que choisir entre spontanéité et tentative de séduction ? J'aimerais pouvoir répondre « les deux » mais tout porte à croire que cela ne suffirait pas. Du temps où nous n'étions que 30 par classe chacun se connaissait plus ou moins mais entre les options et les enseignements de diversification, un étudiant est nécessairement noyé dans la masse et c'est déjà bien si ses professeurs arrivent à se souvenir de son prénom ! Les éloges de mes différents professeurs de littérature me manquent mais je ne dois pas être la seule pour qui le besoin de reconnaissance serait potentiellement salvateur. Si déjà mes contemporains pouvaient me remarquer, si je pouvais éveiller dans leur esprit la même remarque que Marie s'était faite alors qu'elle ne m'aimait pas encore « voilà quelqu'un qui doit être intéressant ! ».

Je ne suis pas un génie, je ne suis pas folle, mais je peux essayer s'il n'y a que ça pour qu'au moins je plaise à mon double bienfaisant. J'emploie le peu de bon sens que je possède à se tordre mille fois pour qu'il en sorte une œuvre, un cri, un déchirement de l'espace et que j'y puisse passer ma tête « Voyez, voyez, c'est moi qui empruntait tous les jours ce chemin ! Voyez, c'est moi qui ai foulé cette herbe sous votre étouffante indifférence ! Et pendant que je marchais je pensais de ces choses ! J'ai tellement pensé que ça remplissait l'atmosphère et que vous ne vous en rendiez pas compte ! Oui j'ai pensé à vous, à vous et aussi à vous sans que jamais vous ne vous en doutiez, trop occupés par toute autre chose que moi ! S'il fallait vous raconter, ça prendrait une vie et assurément il ne resterait pas assez de la vôtre maintenant ! Il est trop tard mais tout de même aimez-moi un peu, je saurais m'en contenter.»
Ainsi je m'en irai ivre de mes propres paroles, vacillante sur mes immenses jambes blanches, trouver un endroit digne de ma noyade, quelque champêtre clairière loin de tout.

N'en faire pas assez, en faire trop. Rester assise ici près de rien, près de personne ou m'échapper vers nulle part. L'être humain n'est jamais satisfait de sa condition, un désir laisse place à un autre jusqu'à l'épuisement. J'ai toujours été capable de lever la tête après un coup, silhouette rouge dans l'horizon qui tournoie, tenant à peine debout. "C'est dans le malheur qu'on sent le mieux ce que l'on est". Mais on ne passe pas sa vie à être triste ce serait insupportable alors on emprunte un air détaché, on évite de se laisser trop approcher en gardant pour soi le plus important, le moins drôle, le plus grave. On sourit à ces gens qui vous veulent du bien. Et à ces gens que je ne connais guère et qui ignorent que la sincerité spontanée se croyant divertissante peut blesser... à ces gens qui se fichent des conséquences d'un mot, d'une phrase prononcée comme on brise une feuille morte... sans y prêter attention. A ces gens j'aimerais leur montrer la silhouette rouge, cadavérique qui danse au coucher du soleil, la silhouette pendue qui se balance entre deux mondes. Je ne suis pas une femme, je suis tout juste un être humain quand je croise vos regards, vous détruisez le mien qui ne peut plus souffrir son reflet sans se dire "ne suis-je pas trop laide pour sortir ainsi ? Exposer la monstruosité à cet exterieur là ?". Il y a des jours où j'arrive à oublier qui je suis, ces jours là sont merveilleux, les jours où je n'aperçois pas le dégoût dans l'oeil de mes contemporains. En général cela signifie que j'ai réussi à le leur faire oublier par quelque trait d'esprit ou d'humour. Ou parce que plus courageux que la moyenne je ne leur inspire rien de particulièrement repoussant (même si évidemment jamais rien d'attirant non plus). Moi qui me félicite de ne pas laisser indifférent j'ai parfois du mal à ne pas désirer cette indifférence, se fondre dans le paysage plutôt que de suciter la moquerie serait un repos bien mérité. Danse le squelette écarlate parmi les ombres, balance, tangue, vacille sans jamais chuter, continue ton ballet infernal jusqu'au dernier râle, au dernier gémissement de la corde autour de ton si petit cou. On se souviendra peut-être de la ballade du pendu mais hélas j'en doute, qu'il se balance près de l'ombrelle ou qu'il se noie, la torture de Prométhée n'a ni fin ni secours et emporte avec elle l'automne, l'hiver et la poésie.

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